Votation du 24 novembre 2024; aménagement des routes nationales. L’illusion d’une solution durable.

Alors que les extrêmes liés au dérèglement climatique tiennent le devant de la scène de façon récurrente, « grâce » à la poursuite de nos émissions multiples de gaz à effet de serre, le Conseil fédéral et une majorité des Chambres ont eu l’audace de voter une adaptation du réseau autoroutier pour fluidifier les endroits engorgés.

Cette avancée sur le terrain se traduit par l’élargissement de tronçons qui nous permettront d’ici une à deux décennies à entrer sans retard dans les zones fortement urbanisées. La fluidité retrouvée permettra de ne plus perdre du temps, vraisemblablement d’en gagner.

Pourquoi s’interdire de retrouver ce confort ? Pourquoi renoncer à des chantiers très lucratifs alors que nous avons dans la proximité des bureaux d’ingénieurs, des entreprises de génie civil, des gravières, des cimenteries, et surtout des terrains agricoles plutôt plats ?

Dans sa séance du 16 octobre 2024, la Chambre suisse d’agriculture de l’Union suisse des paysans a décidé de soutenir ces projets autoroutiers. L’alliance scellée avec Économie suisse portera de nouveaux fruits avec 5 milliards à investir si le résultat du vote se traduit par un feu vert.

Pour la sécurité alimentaire, si chère à l’USP, il n’y a pas de quoi s’alarmer pour si peu de terres perdues. Cette bienveillance paysanne servira d’autres projets à l’avenir pour autant que ce grignotage demeure raisonnable. Les bulldozers passent, les agriculteurs directement concernés passeront un mauvais moment.

Les pluies diluviennes, les sécheresses et les incendies plus précoces, la montée des eaux confirment que le dérèglement climatique ne peut plus être considéré comme une crise passagère ou un événement exceptionnel, il fait désormais partie de notre quotidien.

La campagne de votation gagne en intensité, elle monte en puissance. Les uns et les autres grappillent les moindres arguments pour étayer leur position, convaincre et si cette nouvelle confrontation au sujet de la mobilité polluante était inutile, dépassée ?

D’ici quelques décennies, voire un demi-siècle, les plus optimistes misent sur le remplacement des moteurs thermiques par des moteurs électriques ; de la plus petite voiture aux mastodontes des mers en passant par les camions, les avions, l’énergie solaire sera la reine. Si la capacité de capter cette énergie est insuffisante, l’énergie nucléaire avec sa nouvelle génération de réacteurs suppléera au manque.

Et c’est reparti pour un tour à l’échelon planétaire ; extension de l’exploitation minière, construction de nouveaux sites industriels pour purifier la matière convoitée avec la production de nouveaux déchets plus ou moins toxiques pour lesquels il faudra trouver de nouveaux endroits d’entreposage avant de trouver les lieux adéquats pour les enfouir sans risques de pollution, constructions de nouvelles voies d’accès pour s’emparer de ce nouvel eldorado.

Il y a quelque chose de titanesque, dans cet emballement de l’ère industrielle pour alimenter un modèle économique qui ne peut accepter la stagnation, et encore moins une récession. Le doute, puis le vertige tracent son sillon en parallèle de l’avancée technologique débridée.

Repartir dans un nouveau tour de grande envergure pour assurer un mode de production et de consommation qui doit tourner à plein régime, sans se soucier des limites de la planète, a quelque chose de pathétique.

Une fois de plus, nous constatons que l’homme est le seul mammifère qui investit avec une efficacité redoutable et sans relâche dans la destruction de l’environnement naturel, sa source de vie.

Pourquoi une telle envolée à partir de quelques tronçons d’autoroute dont plus de la moitié seront des tunnels ?

Parce qu’à l’évidence, il nous faut renoncer à offrir plus d’espace à la mobilité individuelle motorisée, et une fois pour toutes donner la priorité à la mobilité douce, aux transports publics. Lorsque nous aurons enfin accepté cette priorité, nous aurons plus de liberté et d’espace pour aménager des voies de mobilité durables.

Fernand Cuche et
André Frutschi, ing. agronome EPFZ
Lignières, le 24 octobre 2024

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Défis climatique et biodiversité : de la parole aux actes

Défis climatique et biodiversité : de la parole aux actes

Mercredi 18 septembre 2024 / 19h – 21h – Salle de l’Esplanade à Aubonne

Conférencière et conférencier : Lisa Mazzone et Fernand Cuche

Programme : Près de 90% de la population perçoit les changements climatiques comme très dangereux ou plutôt dangereux. Nous sommes la source du problème, nous devons faire partie de la solution, mais comment ?

Peu importe notre âge, notre genre, notre milieu, nous pouvons toutes et tous agir. Dépassons les clivages, venez comme vous êtes et ensemble passons à l’action !

Organisation : association mellifera, Leïla Namoune, Lindsay Lessard, Alexi Ernstoff, Sébastien Humbert, Guillaume Schneider, Mikhaél Minisini

Contact : gs@association-mellifera.ch

Résumé de la conférence

1. Introduction sur les biais cognitif à la façon déformée de voir les choses (Lindsay Lessard).

 

On pense souvent que… Mais les faits sont plus nuancés :

  •  les jeunes ont plus d’impact que les personnes âgées (notamment à cause d’une utilisation plus importante de l’avion) ;
  • les personnes qui habitent en campagne n’ont pas plus d’impact que ceux qui habitent en ville (les campagnard.e.s utilisent plus la voiture mais moins l’avion que les urbain.e.s) ;
  • l’appartenance politique est décorrélée de l’empreinte environnementale pour un même revenu : une personne qui vote « Vert » n’a, en moyenne, pas moins d’impact qu’une personne qui vote pour un autre parti.

    2.  Questions de l’association mellifera à Lisa Mazzone et à Fernand Cuche

Question climat et biodiversité : quels sont les moyens d’actions pour passer de la parole aux actes pour que des changements importants se fassent ressentir ?

Intervention de Lisa Mazzone : Lisa Mazzone a souligné l’urgence écologique à laquelle nous faisons face et l’importance d’agir à tous les niveaux. Selon elle, la politique joue un rôle crucial en créant des conditions cadres qui permettent aux petites actions locales de gagner en ampleur. Elle insiste également sur la nécessité de s’engager à un niveau local, par exemple par le biais  d’associations qui sont des espaces de création et de partage.

Intervention de Fernand Cuche : Fernand Cuche a insisté sur l’importance de faire le tri entre le vrai et le faux, car la population est souvent confuse quant aux actions à entreprendre. Il a mis en garde contre la dépendance aux opinions, affirmant que l’on doit se fier aux faits. Il déplore le manque de lien dans les médias et certains partis politiques entre les événements climatiques extrêmes et les activités humaines, ce qu’il considère comme une forme de déni de la réalité.

Agriculture et biodiversité : défis et solutions

Question agricole et biodiversité : l’agriculture a été fortement bouleversée ces dernières années, tandis que la biodiversité s’effondre. Les efforts actuels sont insuffisants pour inverser cette tendance. Voici les principaux
problèmes identifiés et les solutions proposées :

1. Héritage de l’agrochimie : Après les pénuries alimentaires récurrentes jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, l’agrochimie a permis de passer de la disette à l’excédent, en partie grâce à l’importation d’engrais, de pesticides, et d’aliments pour animaux. Cependant, cela a entraîné des
conséquences néfastes comme la pollution des eaux, l’épuisement des terres, et la réduction de la biodiversité domestique et sauvage.

2. Le défi de l’agroécologie : Le grand défi actuel est de passer de l’agrochimie à l’agroécologie. Cela implique un changement de modèle, d’une agriculture industrielle, que l’on maîtrise bien, mais fortement dépendante de la chimie à une agriculture plus résiliente, de petite échelle, biologique, mais que l’on maîtrise moins bien.

3. Responsabilité du monde agricole : Fernand Cuche et Lisa Mazzone soulignent que le monde agricole n’anticipe pas suffisamment les questions environnementales et se laisse dépasser par la société civile, comme en témoigne l’initiative pour la biodiversité. L’Union Suisse des Paysans (USP)
ainsi que les multinationales agricoles et alimentaires sont en partie responsables de cette situation et doivent se remettre en question.

3. Questions du public à Lisa Mazzone (LM) et Fernand Cuche (FC)

a) Est-ce que cela vaut la peine d’avoir un « Vert » dans un exécutif de droite ?

  • Réponse (LM & FC): Même en minorité, il est important d’avoir un représentant des Verts dans un exécutif de droite. Le principe de collégialité implique que chaque membre du collège doit défendre les intérêts de l’ensemble, et la présence d’un Vert permet d’apporter un autre point de vue.
    Cependant, pour que ses idées avancent, la pression de la société civile reste essentielle.

b) L’agriculture n’est pas unanime vis-à-vis de la future loi sur l’initiative biodiversité. Certain.e.s agriculteurs soutenant l’initiative n’osent pas le manifester. Comment faire face à la pression du groupe majoritaire sur les agriculteurs/trices écologistes ?

  • Réponse (FC): L’Union Suisse des Paysans (USP) exerce une influence importante sur les agriculteurs, créant un climat de conformité où il est difficile pour les agriculteurs écologistes de s’exprimer. Il est nécessaire de rajeunir cette organisation pour qu’elle reflète mieux les réalités et les aspirations
    écologiques de la nouvelle génération d’agriculteurs.

c) La protection de la biodiversité entraîne-t-elle une réduction de la production et une augmentation des importations ?

  • Réponse (FC): Le niveau d’autosuffisance alimentaire en Suisse est directement lié à l’importation d’engrais et de fourrages pour nourrir les animaux. Pour améliorer la situation, il faut réorienter les investissements de l’agro-industrie vers l’agroécologie. Une réduction de la consommation de viande est également nécessaire, car la production animale dépend en grande partie de ces fourrages importés.

d) Quel est le rôle des multinationales dans la transition vers l’agroécologie ?

    • Réponse (FC&LM): Les multinationales sont en partie responsables des problèmes agricoles actuels, car elles privilégient les profits à court terme plutôt qu’une transition durable. Elles n’ont pas encore de plans concrets pour soutenir la transition vers l’agroécologie.
      e) Il y a une fatigue du monde agricole, notamment en raison des contraintes administratives. Comment y remédier ?
    • Réponse (FC&LM): Cette fatigue est réelle et souligne la nécessité de simplifier les démarches administratives pour les agriculteurs, tout en soutenant leurs efforts pour améliorer leurs pratiques.f) Y a-t-il un pays exemplaire en matière de politique agricole ?
    • Réponse (FC&LM): Aucun pays ne peut être considéré comme un modèle parfait, mais de nombreuses initiatives intéressantes existent au niveau local. Ces initiatives peuvent servir de source d’inspiration pour d’autres régions.

Remarque du public : il est essentiel de ne plus dissocier production agricole et biodiversité. La biodiversité peut être une ressource pour l’agriculture, et non seulement une contrainte. Par exemple, l’agroforesterie, qui associe arbres et cultures, contribue à améliorer la résilience des sols et la gestion de l’eau.

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